Noël confiné ?

 

 

Noël aurait-il lieu ? La question était de taille. Il était difficilement imaginable de ne pas se retrouver en famille autour du sapin. Que répondrions-nous aux enfants ? « – Qu’est-ce qu’il a Papa Noël ? Pourquoi ne vient-il pas nous voir ? Il est fâché contre nous ? – C’est que Fiston, Papa Noël, il est confiné en Laponie. – Confiné ? – Oui, comme nous, il ne peut pas sortir. – Il faut délivrer le Père Noël, Papa ! Il est gentil avec nous, il ne nous a jamais fait de mal, il ne nous apporte que des cadeaux ! ». Qui ferait comprendre aux enfants que le Père n’existait pas ? Qu’il n’était qu’une pure invention de Coca Cola pour vendre ses bouteilles ? Noël était lié aux ventes et aux achats. Difficilement imaginable de dire aux commerçants : « Vous ne serez pas ouverts pour les fêtes de Noël ». Nombre d’entre eux faisaient leur plus gros chiffre d’affaires à cette époque de l’année. Heureusement, Superman venait d’arriver avec son vaccin pour sauver la planète ! Il y avait là un beau cadeau à faire pour Noël, offrir un vaccin aux gens qu’on aimait, être débarrassé de ce virus que l’Homme était allé chercher en vendant sur le marché des pangolins. Etre débarrassé de la peur de mourir. Pouvoir de nouveau embrasser, enlacer l’être qu’on chérissait. « – Tu es le vrai Père Noël ? – Oui, puisque je suis là ». Pour la troisième année, je serais le Père Noël de La Baule. Quel bonheur ! A moins que je ne fusse confiné en Laponie. Des Noël, je n’en fêtais guère plus, depuis plusieurs années, du moins plus comme avant. Mes revenus avaient chuté et je n’avais plus l’argent nécessaire pour me déplacer et offrir des cadeaux. Je vivais des Noël plus sobres. J’avais depuis deux années ce bonheur d’offrir de la joie, des sourires, de l’émerveillement aux enfants.

Je quittais mon bonnet, mon écharpe, mes gants, mon manteau, mes bottes, ma longue barbe blanche, je redevenais qui j’étais, longeais la rue, incognito. Les familles étaient à table. Les bougies scintillaient. Je prenais ma voiture. Une bonne heure de route. J’ouvrais ma porte. Je m’endormais avec ces sourires et ces regards émerveillés d’enfants.

Finalement, c’était quoi Noël ? De l’amour ? L’amour d’un parent pour son enfant ? D’un enfant pour son parent ? L’amour de deux êtres ? La tendresse ne se vendait ni ne s’achetait sur le marché du bonheur.

J’avais décidé que chaque jour serait Noël, confiné ou pas.

Thierry Rousse,

Nantes,

11 novembre 2020

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