Les murs des mondanités

C’était quoi les modalités

Écrire

Et ne recevoir aucune réponse

Téléphoner

Et t’entendre dire

Quand avez-vous envoyé ce mail

Je ne le trouve pas

Si on est intéressé, de toute manière, on vous rappellera

Sans doute ta lettre était passée directement à la corbeille sans même avoir été lue

C’était quoi les modalités

Celle qui t’appellait pour te dire qu’elle était intéressée par ce que tu faisais

Puis qui ne te donnait plus aucun signe de vie

Et se gardait bien de décrocher à tes appels

C’était quoi les modalités

Celle qui était prête à te recevoir mais au chapeau

Au chapeau

Depuis quand le loyer

Le pain

Étaient au chapeau

Chapeau troué du mendiant

C’était quoi les modalités

Ce genre de réplique aussi ingrate

Qui êtes-vous on ne vous connait pas

Et toi de lui donner la réplique

Justement c’est pour cela que je vous appelle

Pour vous rencontrer et faire connaissance

Et elle de se justifier

Le responsable est très occupé

Il ne peut pas recevoir tout le monde

Voici

Maintenant

Tu le savais

Tu étais tout le monde

Marcel

Et tout ça n’avait plus aucun sens

Toute cette société-la

A tes yeux

Tout ce monde fabuleux

Tous ces êtres bien lotis

Qui jouaient les pauvres

Jamais d’argent dans les caisses des riches

Quand le pauvre lui voyait toujours le verre à moitié plein sans se plaindre

C’était bien connu

Marcel

Un riche te dira toujours qu’il n’a jamais d’argent

Pourquoi t’épuiser à proposer tes spectacles

A des personnes au fond qui n’en ont que faire

La personne qui était vraiment intéressée par ce que tu jouais, par ce que tu écrivais

S’adresserait naturellement à toi

Et serais heureuse de t’accueillir

En pensant au public qui se réjouirait

De ce que tu partagerais avec lui

Ça au-moins

Ça avait du sens

Ce n’était pas une parole en l’air

Restait à rencontrer cette personne qui avait entendu parler de tes créations

Qui était-elle

Où logeait-elle

Dans quelle hémisphère

Sur quelle planète

L’autre choix était

De renoncer

Baisser les bras

Abandonner tes rêves

Les sourires des enfants quand tu jouais pour eux

Des personnes bien placées dirigeaient le monde

Et elles te renvoyaient à ta place sur la touche des perdants

Il te restait à mourir lentement de ta toux

Qui n’en finissait pas d’en finir

Victime d’un dérèglement

Climatique

Economique

Politique

Ethique

Tes malles ne seraient plus jamais ouvertes

Tu croupirais en silence invisible

Derrière les murs des mondanités

Un mot aussi dur à dire que ses murs

Combien de talents avaient été ainsi ignorés

Reconnus bien trop tard leurs pieds sous terre

Combien n’entraient pas dans les cases des modalités

Du pedigree de l’entre-soi

Marcel

C’était fini

Et tu pleurais dans ta solitude

Personne ne voyait tes larmes transparentes

Tu étais tout le monde

Marcel

On ne voyait jamais tout le monde

Disparaître

Que les gens connus

La grâce te rappellait vers elle

De ses ailes

Coquillage d’une plage

Une sirène murmurait à ton oreille

Moi, j’ai envie que tu vives

Parce que moi je t’aime

Tu es mon cœur

Tu es mon oeil

Tu es ma main

Tu es mon pied

Tu es le sens de ma vie

De toute ton oeuvre

J’ai envie

Marcel

Et je te dis

Au bout du monde

Allez chauffe

Marcel

Allez chauffe

Marcel

Dans la rue des Olivettes

Il y a bien encore un peu de soleil

Pour la cueillette des amours

Allons-y ma grâce

Y faire un tour

Et nous remplir les yeux

D’un nouveau jour

Les murs ne sont que des façades

Au destin peu glorieux

Seuls derrière les grilles

Les fleurs sont nos amies

Et le jardinier qui prend soin de leur vie

Derrière les chants d’avril

Tenons fidèle

Notre fil

Nos regards vers le ciel

Loin des mots durs

Qui sentent le renfermé

Mondes vanités

Mondanités

Allez chauffe

Marcel

Allez chauffe

Marcel

Mange tes mots

Dans un bar

Vivant

Ils te tiendront chaud

Thierry Rousse
Nantes, vendredi 15 mars 2024
"Une vie parmi des milliards"

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