Bonne année

C’était là

la nouvelle année

à nous dire

« Belle et heureuse année ! »

et pour les plus courageuses

et les plus courageux d’entre nous

un mot personnalisé

adapté

ciblé

qui nécessitait une certaine connaissance de ma ou de mon

destinataire

une certaine vision

une certaine intuition

dirais-je même

dans l’obscurité d’une forêt

l’oeil averti d’une sorcière.

Garder la tradition

l’entretenir

la tradition qui pouvait

susciter en moi cette sensation

de me sentir obligé d’adresser mille messages

et de répondre à mille messages

jusqu’à ne plus savoir à qui j’avais écrit

à qui j’avais répondu

où étaient ces serpents

qui sifflaient sur nos têtes

suspendues.

Tête

tête à tête

tête en l’air.

Il y aussi le message adressé à toutes et à tous

la phrase identique destinée à chacune et à chacun.

Tout l’art consistait à rédiger un message universel

qui pouvait s’adresser à chaque âme

et à chaque coeur

de l’univers.

C’est qu’il en fallait

un sacré temps pour écrire

ces bons sang de voeux

jusqu’à, épuisé,

être à court d’idée

une page blanche

de voeux

gardés au fond de mes pensées.

Et, à moi

quels voeux pourrais-je bien m’adresser ?

Me voulais-je du bien

et quel bien ?

Quel chemin tracer jusqu’au bout

des galaxies

parmi le chaos d’un monde en déclin

d’une apocalypse annoncée ?

Des voeux

quand tout déraillait

Des voeux

quand le Chef d’Etat

paradait

Des voeux

quand il nous faisait peur

tout en nous rassurant

Des voeux

quand ses mots se contredisaient

Des voeux

pouvions-nous encore écrire des voeux ?

La caresse d’un baiser

La longue étreinte des amoureux

qui se promettaient fidélité

sur le Pont des Arts ?

Des voeux

qui ressemblaient fort à un adieu.

Et pourtant

elle était là

l’ardente envie de vivre

de dire que cette année serait la bonne année

que tout changerait

que tout irait mieux.

L’envie d’y croire

deux mains sur le clavier des mots

à écrire leur histoire

un soir

et un matin

dix pour cent de batterie

et un fil pour la vie.

Des voeux

Bonne année !

Puisque la bonté

au fond

était au commencement

de tout.

Thierry Rousse

Nantes, mardi 3 janvier 2023

« Une vie parmi des milliards »

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