Rendez-vous avec la page blanche

 

Le rendez-vous était fixé.

Ce samedi soir vingt deux janvier deux mille vingt deux.

Là où il y avait un temps calme, un temps vide pour écrire, entre deux.

Le vide d’une page blanche.

Quelles traces pouvais-je laisser sur une page blanche ?

La solitude d’une page blanche.

Un ange.

Un mot.

Deux mots.

Peut-être trois.

Avalanche de mots.

Des montagnes russes de joies et de vides.

Mobiles instants éphémères.

Entrées sous conditions.

Parcourir la ville.

Poursuivre.

Suivre.

Là où s’est permis.

Les ailes d’un ange.

Un garage reconverti, ouvert à tous les vents.

Wattignies à la quête de chansons.

Rencontrer William Sheller entre ses rayons d’habits et de roues de vélos, sonder ses yeux, lui glisser quelques mots.

« Et toi, comment vas-tu ? Où marches-tu ? Vers quel but ? »

« Je marche seul ».

William m’avait répondu.

Pondu quelques sons.

J’étais heureux.

Je suivais les traces de sa solitude sur les trottoirs de Nantes.

Champs de mots éparpillés, dispersés.

Un cortège devant l’hôpital rangeait ses banderoles.

Trop tard ou trop tôt ?

« Est-ce que j’écoute vraiment les besoins de mon corps ?

Est-ce que je ressens la précision des besoins de mon corps ? » (1)

Les besoins de chaque pas, l’un après l’autre, qui défilaient sur les trottoirs d’un samedi ?

Réussirais-je à me nourrir d’une alimentation vivante, composée essentiellement de végétaux crus biologiques ?

Autant de pensées qui traversaient ma tête.

Peut-être.

La dernière petite flamme s’était éteinte sur le réchaud de ma cuisine.

La bouteille de gaz était définitivement vide.

Alors, j’avais quitté ma maison, je relisais mes notes sur mon carnet blanc.

Notes blanches de mes lectures au fil des jours.

De mes jours et mes nuits blanches.

« Grâce à l’alimentation vivante, la sensation de vivre devient fascinante et la conscience du moment présent s’installe durablement. Cette alimentation porte en elle une inaliénable intention de respect infini pour la Vie, d’amour, de joie. Cette alimentation est vivante, elle est la vie, et elle inonde l’organisme de pétillement de vie, réveillant joyeusement les cellules, l’ADN et les structures les plus subtiles de l’être. L’alimentation vivante est véritablement source de réalisation de soi mais aussi de réconciliation avec la planète. L’homme et la Terre ne vivent-ils pas en quelque sorte l’un pour l’autre ? » (1)

L’un pour l’autre.

Me nourrir de moi et de toi.

Soigner mon coeur de douces étreintes.

Osez le grand amour à deux.

« Si vous vous encouragez mutuellement, une réelle intimité pourra naître ». (2)

Intimité d’un regard.

Reliés l’un à l’autre.

Monsieur Julon avait au-moins permis cela, lui qui voulait nous emmerder, avait réussi à nous faire exister.

Cette vie nous appelait à une toute autre vie.

« Mon Souffle t’élèvera au-dessus d’eux aussi légèrement que le vent soulève les ailes d’une cigogne au-dessus des bêtes sauvages ». (3)

Jusqu’ici, l’histoire avait été écrite, de guerre en guerre, par les maîtres qui voulaient posséder la Terre.

Nous étions conditionnés à leur paix sous condition.

La nuit était venue d’écrire l’histoire de lumière en lumière, la vivre au grand jour, sans condition.

La nuit était venue, entre ses anneaux de lumières, de nous affranchir, une bonne fois pour toutes, de nos maîtres.

Face à nos libérateurs, nous devions rester prudents.

Après avoir libéré Nantes des Danois, « Alain Barbetorte renforça son autorité sur les campagnes environnantes » (4)

Nous autres devions apprendre, avec le temps, à être les propres libérateurs de nos coeurs, les seuls accoucheurs de nos âmes.

Danser avec le Capitaine Alexandre après avoir enlacé nos mots à une scène ouverte au Champ libre de tous les possibles.

Ecrire, et bien plus encore, vivre, vivre, vivre . . .

Le rendez-vous était fixé.

Rendez-vous avec la nuit blanche.

Thierry Rousse

Nantes, samedi 22 janvier 2022

« A la bonne heure »

  1. « Alimentation Santé Planète, nourrir la vie », Jean Briffaut, édition La Maison Autonome.

  2. « Osez le grand amour », Susan Jeffers, édition Marabout.

  3. « La révélation d’Arès », édition Adira

  4. « Petite histoire de Nantes », Christophe Belser, édition La Geste

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *