Le p’tit grain de sable « Pareils, pas pareils? »

Conte et théâtre miniature Pêcheurs d'histoires

Les thématiques développées à travers le spectacle « Le p’tit grain de Sable » apparaissent sous une forme ludique, accessibles à des enfants à partir de 3 ans.

Elle se présentent comme des pistes de réflexion qui peuvent être reprises sous forme d’échanges après le spectacle avec les enfants et les adultes dans le cadre par exemple d’un « atelier-philo ».

 

L’une des thématiques du spectacle  aborde le sujet: « Pareils, pas pareils ».

« Pareils » : ce qui nous est commun, universel, ce qui nous rassemble : l’enfant qui vit en nous.

Les atouts de l’enfant sont notamment son esprit de curiosité, son imagination, sa créativité, sa découverte du monde, des objets qui l’entourent, sa capacité à détourner les objets de leur utilisation usuelle. Les objets deviennent un partenaire de jeu avec lesquels l’enfant aime inventer et raconter des histoires.

Cet enfant « libre et créatif » demeure à travers nous, à travers les âges, si nous prenons le temps de nous reconnecter à notre « enfant intérieur ».

La pratique du Clown, « découvrir notre clown » est l’un des chemins qui nous permet de nous reconnecter à l’enfant qui vit en nous.

La forme du spectacle repose sur cette proposition : ce qui nous rassemble, ce qui est commun, universel, « l’enfant qui vit en nous ».

L’interprète joue avec des figurines autour d’un théâtre miniature, invente et raconte des histoires avec ces figurines et les objets.

Un béret de marin, par exemple, devient pour lui un « petit chapiteau bleu avec son nez de clown ». « Si j’entrais dedans ? » demande-t-il avec complicité au public.

Les deux personnages de l’histoire, Pierrot et Amélie, ayant vieilli, se retrouvent également « enfants » grâce à la perle magique.

L’enfance nous permet de passer de la réalité à la fiction, et, de regarder également autrement la réalité, avec un regard neuf, émerveillé, enjoué, créatif.

 

« Pas pareils » : ce qui nous différencie, ce qui peut nous faire peur, ce qui nous permet de nous découvrir, nous enrichir mutuellement.

A travers l’histoire, le personnage de Pierrot découvre « l’autre » qui n’est pas pareil que lui, ces êtres qui appartiennent à un autre univers, un univers imaginaire avec la Sirène et le Dragon, un univers marin avec le poisson, les fruits de mer, l’huître, un univers mystérieux avec la perle au fond de l’huître.

Ce qui n’est pas pareil peut nous faire peur parce qu’il nous est inconnu et qu’on ne connaît à son sujet que ce qui nous a été raconté sur lui.

Pierrot se méfie de la Sirène quand elle l’invite à le suivre dans le Palais du Dragon au fond des mers. « Tu veux me séduire et m’engloutir au fond des mer, n’est-ce pas ? » lui dit-il. « Qui t’a dit cela ? » lui demande-t-elle. « Les marins sur le port » lui répondit-il.

Ce qui se dit, se colporte de bouche à oreille peut engendrer de fausses croyances, des peurs qui persistent à travers le temps. Longtemps, la Sirène fut représentée comme une menace pour l’être humain.

La peur vient de l’image qu’on peut se faire d’un autre être, de ce qui nous a été dit sur lui ou de la manière dont on se le représente. Nous avons par exemple la vision occidentale, médiévale du « Dragon », un être terrifiant qui crache du feu. Pierrot est peu rassuré quand il rencontre le Dragon. « N’aies pas peur, je suis un Dragon gentil, je veille sur l’océan et tous ses habitants » dit le Dragon à Pierrot.

L’histoire « Le p’tit grain de sable » librement inspiré d’un conte coréen « le chien, le chat et la perle magique » nous invite à découvrir une autre culture différente de la nôtre, la culture asiatique avec ses légendes, ses symboliques, où le Dragon a une toute autre signification.

 

Ce « Pas pareils », nous le retrouvons aussi à travers chaque être. Nous sommes amenés à évoluer, à changer. Pierrot et Amélie vieillissent. Lorsque Pierrot découvre Amélie rajeunie, il ne la reconnaît pas : « Tu as changé, tu n’es plus pareille ». Amélie, de même, est surprise quand elle découvre Pierrot rajeuni : « Toi aussi, tu n’es pas pareil ». Chacun-e peut expérimenter cela, cette sensation de ne pas reconnaître l’autre tellement il-elle a changé, que ce soit sur un plan physique que psychologique. Le « Pas pareil » provoque la surprise, l’étonnement et peut susciter de nouveau l’attrait de redécouvrir l’autre.

Le « Pas pareil » peut être source d’émerveillement et révéler la richesse de la vie. A travers l’histoire, nous apprenons que la perle Magique était autrefois un petit grain de sable « avant qu’une huître ne l’avale ». « Qu’est-ce qui me gratouille le gosier ? » se demande l’Huître incommodée. « Un petit grain de sable ? ». « Afin que le petit grain de sable glisse mieux dans le gosier de l’huître, l’huître l’enveloppe de sa nacre, et c’est ainsi que le petit grain de sable est devenu une jolie perle ».

Ce qui nous dérange, n’est pas pareil, peut être l’occasion de nous grandir, nous enrichir, découvrir des capacités en soi qu’on ne soupçonnait pas.

« Pareils pas pareils » :

Ce qui, au final, nous rassemble est que nous sommes à la fois pareils et pas pareils. Nous sommes différents, nous changeons, en nous coexistent plusieurs êtres, comme ce petit poisson devenu Dragon, ce qui est source d’enrichissement, d’évolution : en cela nous sommes « pareils », appelés à devenir, à être « autre », à « grandir », à « vieillir » aussi.

A travers le temps, demeure cette part d’intemporalité, de présence à l’instant présent, la « conscience », « l’enfant qui vit en chacun de nous » et qui nous permet de nous retrouver à travers l’essentiel.

De nombreux asiatiques ont une toute autre approche de la vie et de la mort, la vie est perçue comme une perpétuelle renaissance, et, de ce fait, éternelle.

La Perle Magique a retrouvé le Palais du Dragon. « Nous ne pourrons plus jamais retrouver l’île de notre enfance » dit Pierrot à Amélie (sous-entendu, « rajeunir »). « Oui, lui répond Amélie, mais il nous reste une Perle, la Perle de notre Amour, et celle-ci restera toujours avec nous ».

 

Notes « Pistes pédagogiques autour du spectacle Le p’tit grain de sable »

Thierry Rousse,  Saint-Nazaire, le15 novembre 2018.

« Le p’tit grain de sable » Retrouver la simplicité et la joie de Noël

« Le p’tit grain de sable » est de retour le mercredi 12 décembre 2018 dans l’une de ces bibliothèques de villages qui me tiennent tant à coeur ( à 11h, Bibliothèque de Tallud Sainte-Gemme en Vendée, dans le pays de Pouzauges).

Une belle occasion de retravailler mon spectacle pour la période de Noël !

« Le p’tit grain de sable » (Pêcheurs d’histoires) est un spectacle qui vit, qui se renouvelle, conçu comme une renaissance perpétuelle, comme un voyage avec ses escales, ses découvertes, ses rencontres qui lui font voir de nouveaux horizons, le nourrissent, l’enrichissent.

« Le p’tit grain de sable » à la lumière de Noël, l’occasion de me replonger dans mes souvenirs de Noël: « déposer mes chaussons au pied du sapin, monter dans ma chambre, dormir, ou plutôt, faire semblant de dormir… quand, soudain, j’entends une petite voix m’appeler: -Le marchand de sable est passé! Le marchand de sable est passé ! Aussitôt, je bondis de mon lit, descends une à une les marches de l’escalier, et, là, au pied du sapin, je découvre un magnifique cadeau… ».

Noël, le temps des cadeaux, mais de quels cadeaux au juste?

Le plus beau cadeau de Noël, celui dont je me souviens le plus, enfant, était, est et sera toujours celui de l’Amour, de la tendresse, de la joie d’être ensemble, de ces petites choses qui font  voyager,  avec lesquels je peux entrer dans des histoires, être toutes sortes de personnages, vivre toutes sortes d’aventures, créer des mondes imaginaires, inventer, fabriquer le monde de mes rêves.

Un livre de contes de Corée…

Un béret de marin avec son pompon rouge, on dirait un nez de clown, et quand j’entre dedans, un petit chapiteau bleu…

Une petite figurine, elle a dû beaucoup voyager, son épaule est toute abîmée, on l’a même recollé… Comment pourrais-je l’appeler? Et si je l’appelais Pierrot, comme Pierrot La Lune?

Eh, oui, un tout petit objet, même un objet récupéré, recyclé, peut susciter le plus grand bonheur qui soit, ouvrir les portes de l’imagination et de la liberté.

En cette période critique pour l’avenir de notre humanité, pour d’innombrables espèces animales et végétales causée par notre surproduction et notre surconsommation, les deux étant liées, s’entraînant l’une vers l’autre – je vous invite à lire « Pourquoi tout va s’effondrer » de Julien Wosnitza- il me semble, nécessaire de proposer une alternative, une voie possible vers la décroissance: retrouver les joies simples de la vie, notamment en cette période de Noël qui se prépare…

« Le p’tit grain de sable » telle une étoile, est l’un de ces millions grains de sable qui nous relient à la Vie.

Thierry Rousse, Nantes, 11 novembre 2018.

 

 

 

Etre Clown ou Faire le Clown?

Thierry Rousse Clown tO

Etre Clown ou faire le Clown ?

Thierry Rousse Clown tO
Etre Clown ou Faire le Clown?

Décembre 2016, un ami, Christophe, m’appelle pour me demander si je peux l’aider à travailler un solo de Clown. Le Président d’une association de restauration de vieux bateaux sur le port des Sables d’Olonne lui a proposé  d’animer le « Marché de Noël des Gueux » qu’il organise sur le Parvis de l’Hôtel de Ville.

Je lui réponds : -T’aider à te faire travailler un Solo, non, mais jouer avec toi, oui !

Il y a sept ans que je n’avais pas pratiqué le clown et je ne me voyais pas compétent pour faire  travailler un Solo de clown, mais jouer avec un partenaire, oui, avec joie !

Sept années que mon nez de clown en cuir était dans son joli petit coffret en bois sculpté offert par mon professeur-guide-accompagnateur Clown, Jean-Luc Mordret. Sept années que mon nez m’attendait, qu’il attendait ce jour où je reviendrais vers lui, où je le mettrais, où il m’accompagnerait, me guiderait de nouveau vers le lieu le plus intime de moi-même, fragile et fort à la fois, ce lieu de liberté et de créativité, ce lieu de communion avec mon « je », avec cette énergie de vie qui fait repousser peu à peu mes limites, ce nez né dans un monde où il a tout à découvrir, voir, toucher, sentir, explorer, ressentir, expérimenter, rencontrer, où le champ des possibles s’ouvre à lui.

Quelle heureuse opportunité qui m’était offerte !

C’est alors que les questions, les doutes, le désir, la peur jaillissaient, se croisaient, bouillonnaient dans mon cerveau.

Est-ce que je retrouverais mon clown ?

Où est mon clown, quelque part caché, enfoui en moi ?

Ai-je vraiment trouvé mon clown ?

Quatre année de pratique de clown épisodique, est-ce vraiment suffisant pour trouver mon clown ?

Existe-t-il une durée nécessaire pour trouver mon clown ? Un certificat d’authenticité délivré par une Haute Autorité Officielle, agréée qui me déclare : « Ca y est, tu es clown ! ».

Qu’est-ce qu’être clown ?

Suis-je clown ?

Au fond, je l’ignore, je ne le sais pas vraiment, peut-être oui, peut-être non, peut-être ai-je frôlé mon clown, puis je l’ai perdu, puis retrouvé, puis reperdu, peut-être ai-je trouvé un petit bout de clown, puis un autre petit bout, des bribes de mon clown, « mon » clown, qu’est-ce que j’en sais  si c’est « mon » clown, qu’est-ce qui me permet de dire que c’est « mon » clown, c’est peut-être le clown d’un autre, de qui ?

Voici qu’à force de réfléchir, tout s’embrouillait, je me perdais, il est peut-être là le clown, quand tout s’embrouille, dans cet imbroglio d’un fil qui à force de le repasser en-dessous, au-dessus, à droite, à gauche, finit par s’emmêler, un imbroglio de fils issu d’un seul fil. Le clown a l’art de se mettre lui-même dans une situation confuse, périlleuse dont il nous paraît de plus en plus difficile pour lui qu’il s’en sorte. Le jeu du clown est alors de trouver une solution : comment vais-je me sortir de tout ça ? Par quel bout tirer ? Plus je veux m’en sortir, plus je me crée de nouveaux obstacles sans le vouloir.

« Sans le vouloir », c’est peut-être là un autre aspect du clown : rien n’est réfléchi à l’avance, rien n’est intentionnel, calculé à l’avance, tout se vit dans l’instant présent. Accueillir l’instant présent, être au plus proche de ce que je vis, de ce que je ressens dans l’instant présent.

J’en étais là de mes pensées, me raccrocher à ce que  Jean-Luc Mordret m’avait transmis, à ce que j’avais expérimenté dans des improvisations, des jeux, des duos, des solos…

J’en étais là à vouloir retrouver la recette pour être clown, être clown pour pouvoir faire clown, car comment faire le clown si je ne suis pas clown ?

Je peux très bien faire du vélo sans être cycliste, c’est le fait de faire du vélo qui fait de moi un cycliste, quelque soit mon niveau.

En est-il de même du clown ? Est-ce en faisant le clown que je suis clown ?

Serait-ce acquis une bonne fois pour toutes en moi, comme le fait de faire du vélo ? Ou de conduire une voiture ? Ou de marcher ?

Y-a-t-il des savoir-faire qui s’oublient comme une langue étrangère que je finis par oublier si je ne la pratique pas régulièrement ?

J’en étais là à chercher dans ma mémoire tout ce que nous faisions en atelier, nos exercices, tout ce que nous disait Jean-Luc, je ne me souvenais pas de tout, certaines choses revenaient par-ci, par-là.

Un genre de puzzle avec des pièces éparpillées, des pièces peu à peu qui se rassemblaient et des pièces manquantes.

Tant que je restais dans le cérébral, dans mon intellect, cela donnait ce genre de puzzle incomplet, pas de quoi être vraiment clown.

Cherchais-je vraiment « mon » clown là il logeait ? Pas vraiment.

Mon clown est dans mon corps, non dans mon intellect, dans ce que je vis, non dans ce que je pense, ou plutôt dans cette relation entre les deux, dans ce que je vis et dans ce que je pense de ce que je vis quand je le donne à voir aux autres qui me regardent et que je suis à l’affût de leurs réactions.

Bref, tout cela a l’air bien compliqué, trop compliqué pour le clown, comme s’il était compliqué de vivre, d’être tout simplement. A cette complexité, le clown répond par le jeu, s’arrête, écoute ce qu’il ressent, interroge le public, reprend son jeu en intégrant ces nouvelles données.

Là encore j’étais loin du clown tant que je n’ouvrais pas ma petite boite et que je ne mettais pas mon nez, ce passage sacré, ce rituel tel que nous l’avait enseigné Jean-Luc.

Me tourner dos au public, me connecter à moi-même, dans une profonde et intime écoute, respirer, faire le vide en moi, me laisser guider par ce nez que je pose sur la partie que je ne vois pas de moi, accueillir cette nouvelle présence, ce nouvel élément, cet autre-moi que je vois, entrer en relation avec cet autre-moi, faire connaissance, nous apprivoiser l’un et l’autre, nous découvrir lentement, me retourner, et découvrir tous deux l’autre, les autres qui nous regardent, l’espace, les objets, les bruits, les odeurs, les sensations, ce lieu où tout devient jeu d’exploration, d’expérimentation, de voyages, d’aventures, approfondir, creuser.

J’en étais là face à la réponse qui m’était posée, face à une certaine urgence, répondre à une commande, monter un spectacle en quelques jours, une animation pour un marché de Noël, animer, faire rire,  apporter un peu de rêve à l’approche d’un Noël terni à par le contexte des attentats, du chômage, de la misère, du réchauffement climatique, des guerres, des exodes forcés…

« Faites-nous rire ! ». Le clown qui fait rire, le clown qui amuse par quelques gags, quelques astuces dont lui seul connaît la recette, le clown qui vient sauver l’humanité d’une situation morose, catastrophique, désespérée, le clown qui apporte un peu d’humanité, de tendresse… Mettre un nez et faire rire, émouvoir, réchauffer les cœurs, ça peut marcher aussi !

J’écrivais une trame, une farce sans parole avec deux personnages, en reprenant le schéma du clown blanc et de l’auguste sur le thème de la restauration de vieux bateaux traversé par cette phrase que j’avais entendue : « Seul, on va plus vite. A deux, on va plus loin », un message, me dis-je, pour Noël comme une bouteille jetée à la mer.

J’étais passé à l’écriture, je m’éloignais sans doute du clown, je contournais l’obstacle des retrouvailles avec mon clown, la peur du vide, la peur de la page blanche.

L’écriture imposait une contrainte de jeu, une partition théâtrale. Comment le clown retrouverait sa place dans cette partition, le clown de Christophe et mon propre clown, là était tout l’enjeu.

Comment le clown s’empare d’une contrainte pour en jouer, pour exister, pour vivre dans l’instant présent de manière authentique, sincère, juste ?

Comment le clown s’amuse à faire le clown ?

Un enjeu, une problématique qui me paraissent intéressants à explorer, se frotter avec cette difficulté d’une partition, creuser plutôt qu’ajouter, l’objectif de travail était défini.

Le temps manquait hélas pour accomplir à bien ce travail.

La première présentation se fit dans l’urgence, une journée de travail à partir de cette trame et de palettes récupérées.

L’urgence peut être un bon déclic pour enclencher un travail.

Ne plus nous poser de questions, plonger, et on verra bien, le réflexe est de nager, de jouer pour nous en sortir.

Le public est là, nous regarde, le temps est pluvieux, maussade, quelques rires, certains visages sans doute surpris, perplexes de voir un tas de palettes, une bâche de chantier, une corde, deux projecteurs au milieu d’un marché de Noël et deux personnages qui se mettent à jouer une sorte de happening.

Après cet happening, vient l’heure du briefing : ce qui a fonctionné ? Ce qui a moins bien fonctionné ? Comment on a vécu cet happening ? Qu’est-ce qu’on fait ? On continue l’aventure ? On s’arrête là ? On fait une pause ? On prend un temps pour réfléchir ?

L’espace de jeu est plus petit que prévu pour jouer cette partition telle qu’elle a été pensée, mise en scène, certains artisans sur les stands nous en font gentiment la remarque.

La dernière proposition est retenue.

Une première étape a été accomplie, posée.

Marché de Noël des Gueux, sur le Parvis de l’Hôtel de Ville des Sables d’Olonne par un jour pluvieux, décembre 2016, quelques palettes récupérées pour réaliser un rêve…

« Seul, on va plus vite. A deux, on va plus loin. »

Nantes, le 11 septembre 2017

 

 

Etre Clown ou Faire le Clown?

Etre Clown ou faire le Clown ?

Thierry Rousse Clown tO
Etre Clown ou Faire le Clown?

Décembre 2016, un ami, Christophe, m’appelle pour me demander si je peux l’aider à travailler un solo de Clown. Le Président d’une association de restauration de vieux bateaux sur le port des Sables d’Olonne lui a proposé  d’animer le « Marché de Noël des Gueux » qu’il organise sur le Parvis de l’Hôtel de Ville.

Je lui réponds : -T’aider à te faire travailler un Solo, non, mais jouer avec toi, oui !

Il y a sept ans que je n’avais pas pratiqué le clown et je ne me voyais pas compétent pour faire un travailler un Solo de clown, mais jouer avec un partenaire, oui, avec joie !

Sept années que mon nez de clown en cuir était dans son joli petit coffret en bois sculpté offert par mon professeur-guide-accompagnateur Clown, Jean-Luc Mordret. Sept années que mon nez m’attendait, qu’il attendait ce jour où je reviendrais vers lui, où je le mettrais, où il m’accompagnerait, me guiderait de nouveau vers le lieu le plus intime de moi-même, fragile et fort à la fois, ce lieu de liberté et de créativité, ce lieu de communion avec mon « je », avec cette énergie de vie qui fait repousser peu à peu mes limites, ce nez né dans un monde où il a tout à découvrir, voir, toucher, sentir, explorer, ressentir, expérimenter, rencontrer, où le champ des possibles s’ouvre à lui.

Quelle heureuse opportunité qui m’était offerte !

C’est alors que les questions, les doutes, le désir, la peur jaillissaient, se croisaient, bouillonnaient dans mon cerveau.

Est-ce que je retrouverais mon clown ?

Où est mon clown, quelque part caché, enfoui en moi ?

Ai-je vraiment trouvé mon clown ?

Quatre année de pratique de clown épisodique, est-ce vraiment suffisant pour trouver mon clown ?

Existe-t-il une durée nécessaire pour trouver mon clown ? Un certificat d’authenticité délivré par une Haute Autorité Officielle, agréée qui me déclare : « Ca y est, tu es clown ! ».

Qu’est-ce qu’être clown ?

Suis-je clown ?

Au fond, je l’ignore, je ne le sais pas vraiment, peut-être oui, peut-être non, peut-être ai-je frôlé mon clown, puis je l’ai perdu, puis retrouvé, puis reperdu, peut-être ai-je trouvé un petit bout de clown, puis un autre petit bout, des bribes de mon clown, « mon » clown, qu’est-ce que j’en sais que si c’est « mon » clown, qu’est-ce qui me permet de dire que c’est « mon » clown, c’est peut-être le clown d’un autre, de qui ?

Voici qu’à force de réfléchir, tout s’embrouillait, je me perdais, il est peut-être là le clown, quand tout s’embrouille, dans cet imbroglio d’un fil qui à force de le repasser en-dessous, au-dessus, à droite, à gauche, finit par s’emmêler, un imbroglio de fils issu d’un seul fil. Le clown a l’art de se mettre lui-même dans une situation confuse, périlleuse dont il nous paraît de plus en plus difficile pour lui qu’il s’en sorte. Le jeu du clown est alors de trouver une solution : comment vais-je me sortir de tout ça ? Par quel bout tirer ? Plus je veux m’en sortir, plus je me crée de nouveaux obstacles sans le vouloir.

« Sans le vouloir », c’est peut-être là un autre aspect du clown : rien n’est réfléchi à l’avance, rien n’est intentionnel, calculé à l’avance, tout se vit dans l’instant présent. Accueillir l’instant présent, être au plus proche de ce que je vis, de ce que je ressens dans l’instant présent.

J’en étais là de mes pensées, me raccrocher à ce que  Jean-Luc Mordret m’avait transmis, à ce que j’avais expérimenté dans des improvisations, des jeux, des duos, des solos…

J’en étais là à vouloir retrouver la recette pour être clown, être clown pour pouvoir faire clown, car comment faire le clown si je ne suis pas clown ?

Je peux très bien faire du vélo sans être cycliste, c’est le fait de faire du vélo qui fait de moi un cycliste, quelque soit mon niveau.

En est-il de même du clown ? Est-ce en faisant le clown que je suis clown ?

Serait-ce acquis une bonne fois pour toutes en moi, comme le fait de faire du vélo ? Ou de conduire une voiture ? Ou de marcher ?

Y-a-t-il des savoir-faire qui s’oublient comme une langue étrangère que je finis par oublier si je ne la pratique pas régulièrement ?

J’en étais là à chercher dans ma mémoire tout ce que nous faisions en atelier, nos exercices, tout ce que nous disait Jean-Luc, je ne me souvenais pas de tout, certaines choses revenaient par-ci, par-là.

Un genre de puzzle avec des pièces éparpillées, des pièces peu à peu qui se rassemblaient et des pièces manquantes.

Tant que je restais dans le cérébral, dans mon intellect, cela donnait ce genre de puzzle incomplet, pas de quoi être vraiment clown.

Cherchais-je vraiment « mon » clown là il logeait ? Pas vraiment.

Mon clown est dans mon corps, non dans mon intellect, dans ce que je vis, non dans ce que je pense, ou plutôt dans cette relation entre les deux, dans ce que je vis et dans ce que je pense de ce que je vis quand je le donne à voir aux autres qui me regardent et que je suis à l’affût de leurs réactions.

Bref, tout cela a l’air bien compliqué, trop compliqué pour le clown, comme s’il était compliqué de vivre, d’être tout simplement. A cette complexité, le clown répond par le jeu, s’arrête, écoute ce qu’il ressent, interroge le public, reprend son jeu en intégrant ces nouvelles données.

Là encore j’étais loin du clown tant que je n’ouvrais pas ma petite boite et que je ne mettais pas mon nez, ce passage sacré, ce rituel tel que nous l’avait enseigné Jean-Luc.

Me tourner dos au public, me connecter à moi-même, dans une profonde et intime écoute, respirer, faire le vide en moi, me laisser guider par ce nez que je pose sur la partie que je ne vois pas de moi, accueillir cette nouvelle présence, ce nouvel élément, cet autre-moi que je vois, entrer en relation avec cet autre-moi, faire connaissance, nous apprivoiser l’un et l’autre, nous découvrir lentement, me retourner, et découvrir tous deux l’autre, les autres qui nous regardent, l’espace, les objets, les bruits, les odeurs, les sensations, ce lieu où tout devient jeu d’exploration, d’expérimentation, de voyages, d’aventures, approfondir, creuser.

J’en étais là face à la réponse qui m’était posée, face à une certaine urgence, répondre à une commande, monter un spectacle en quelques jours, une animation pour un marché de Noël, animer, faire rire,  apporter un peu de rêve à l’approche d’un Noël terni à par le contexte des attentats, du chômage, de la misère, du réchauffement climatique, des guerres, des exodes forcés…

« Faites-nous rire ! ». Le clown qui fait rire, le clown qui amuse par quelques gags, quelques astuces dont lui seul connaît la recette, le clown qui vient sauver l’humanité d’une situation morose, catastrophique, désespérée, le clown qui apporte un peu d’humanité, de tendresse… Mettre un nez et faire rire, émouvoir, réchauffer les cœurs, ça peut marcher aussi !

J’écrivais une trame, une farce sans parole avec deux personnages, en reprenant le schéma du clown blanc et de l’auguste sur le thème de la restauration de vieux bateaux traversé par cette phrase que j’avais entendue : « Seul, on va plus vite. A deux, on va plus loin », un message, me dis-je, pour Noël comme une bouteille jetée à la mer.

J’étais passé à l’écriture, je m’éloignais sans doute du clown, je contournais l’obstacle des retrouvailles avec mon clown, la peur du vide, la peur de la page blanche.

L’écriture imposait une contrainte de jeu, une partition théâtrale. Comment le clown retrouverait sa place dans cette partition, le clown de Christophe et mon propre clown, là était tout l’enjeu.

Comment le clown s’empare d’une contrainte pour en jouer, pour exister, pour vivre dans l’instant présent de manière authentique, sincère, juste ?

Comment le clown s’amuse à faire le clown ?

Un enjeu, une problématique qui me paraissent intéressants à explorer, se frotter avec cette difficulté d’une partition, creuser plutôt qu’ajouter, l’objectif de travail était défini.

Le temps manquait hélas pour accomplir à bien ce travail.

La première présentation se fit dans l’urgence, une journée de travail à partir de cette trame et de palettes récupérées.

L’urgence peut être un bon déclic pour enclencher un travail.

Ne plus nous poser de questions, plonger, et on verra bien, le réflexe est de nager, de jouer pour nous en sortir.

Le public est là, nous regarde, le temps est pluvieux, maussade, quelques rires, certains visages sans doute surpris, perplexes de voir un tas de palettes, une bâche de chantier, une corde, deux projecteurs au milieu d’un marché de Noël et deux personnages qui se mettent à jouer une sorte de happening.

Après cet happening, vient l’heure du briefing : ce qui a fonctionné ? Ce qui a moins bien fonctionné ? Comment on a vécu cet happening ? Qu’est-ce qu’on fait ? On continue l’aventure ? On s’arrête là ? On fait une pause ? On prend un temps pour réfléchir ?

L’espace de jeu est plus petit que prévu pour jouer cette partition telle qu’elle a été pensée, mise en scène, certains artisans sur les stands nous en font gentiment la remarque.

La dernière proposition est retenue.

Une première étape a été accomplie, posée.

Marché de Noël des Gueux, sur le Parvis de l’Hôtel de Ville des Sables d’Olonne par un jour pluvieux, décembre 2016, quelques palettes récupérées pour réaliser un rêve…

« Seul, on va plus vite. A deux, on va plus loin. »

Thierry Rousse, Nantes, le 11 septembre 2017

 

 

Etre Clown ou Faire le Clown?

Etre Clown ou faire le Clown ?

Thierry Rousse Clown tO
Etre Clown ou Faire le Clown?

Décembre 2016, un ami, Christophe, m’appelle pour me demander si je peux l’aider à travailler un solo de Clown. Le Président d’une association de restauration de vieux bateaux sur le port des Sables d’Olonne lui a proposé  d’animer le « Marché de Noël des Gueux » qu’il organise sur le Parvis de l’Hôtel de Ville.

Je lui réponds : -T’aider à te faire travailler un Solo, non, mais jouer avec toi, oui !

Il y a sept que je n’avais pas pratiqué le clown et je ne me voyais pas compétent pour faire un travailler un Solo de clown, mais jouer avec un partenaire, oui, avec joie !

Sept années que mon nez de clown en cuir était dans son joli petit coffret en bois sculpté offert par mon professeur-guide-accompagnateur Clown, Jean-Luc Mordret. Sept années que mon nez m’attendait, qu’il attendait ce jour où je reviendrais vers lui, où je le mettrais, où il m’accompagnerait, me guiderait de nouveau vers le lieu le plus intime de moi-même, fragile et fort à la fois, ce lieu de liberté et de créativité, ce lieu de communion avec mon « je », avec cette énergie de vie qui fait repousser peu à peu mes limites, ce nez né dans un monde où il a tout à découvrir, voir, toucher, sentir, explorer, ressentir, expérimenter, rencontrer, où le champ des possibles s’ouvre à lui.

Quelle heureuse opportunité qui m’était offerte !

C’est alors que les questions, les doutes, le désir, la peur jaillissaient, se croisaient, bouillonnaient dans mon cerveau.

Est-ce que je retrouverais mon clown ?

Où est mon clown, quelque part caché, enfoui en moi ?

Ai-je vraiment trouvé mon clown ?

Quatre année de pratique de clown épisodique, est-ce vraiment suffisant pour trouver mon clown ?

Existe-t-il une durée nécessaire pour trouver mon clown ? Un certificat d’authenticité délivré par une Haute Autorité Officielle, agréée qui me déclare : « Ca y est, tu es clown ! ».

Qu’est-ce qu’être clown ?

Suis-je clown ?

Au fond, je l’ignore, je ne le sais pas vraiment, peut-être oui, peut-être non, peut-être ai-je frôlé mon clown, puis je l’ai perdu, puis retrouvé, puis reperdu, peut-être ai-je trouvé un petit bout de clown, puis un autre petit bout, des bribes de mon clown, « mon » clown, qu’est-ce que j’en sais que si c’est « mon » clown, qu’est-ce qui me permet de dire que c’est « mon » clown, c’est peut-être le clown d’un autre, de qui ?

Voici qu’à force de réfléchir, tout s’embrouillait, je me perdais, il est peut-être là le clown, quand tout s’embrouille, dans cet imbroglio d’un fil qui à force de le repasser en-dessous, au-dessus, à droite, à gauche, finit par s’emmêler, un imbroglio de fils issu d’un seul fil. Le clown a l’art de se mettre lui-même dans une situation confuse, périlleuse dont il nous paraît de plus en plus difficile pour lui qu’il s’en sorte. Le jeu du clown est alors de trouver une solution : comment vais-je me sortir de tout ça ? Par quel bout tirer ? Plus je veux m’en sortir, plus je me crée de nouveaux obstacles sans le vouloir.

« Sans le vouloir », c’est peut-être là un autre aspect du clown : rien n’est réfléchi à l’avance, rien n’est intentionnel, calculé à l’avance, tout se vit dans l’instant présent. Accueillir l’instant présent, être au plus proche de ce que je vis, de ce que je ressens dans l’instant présent.

J’en étais là de mes pensées, me raccrocher à ce que  Jean-Luc Mordret m’avait transmis, à ce que j’avais expérimenté dans des improvisations, des jeux, des duos, des solos…

J’en étais là à vouloir retrouver la recette pour être clown, être clown pour pouvoir faire clown, car comment faire le clown si je ne suis pas clown ?

Je peux très bien faire du vélo sans être cycliste, c’est le fait de faire du vélo qui fait de moi un cycliste, quelque soit mon niveau.

En est-il de même du clown ? Est-ce en faisant le clown que je suis clown ?

Serait-ce acquis une bonne fois pour toutes en moi, comme le fait de faire du vélo ? Ou de conduire une voiture ? Ou de marcher ?

Y-a-t-il des savoir-faire qui s’oublient comme une langue étrangère que je finis par oublier si je ne la pratique pas régulièrement ?

J’en étais là à chercher dans ma mémoire tout ce que nous faisions en atelier, nos exercices, tout ce que nous disait Jean-Luc, je ne me souvenais pas de tout, certaines choses revenaient par-ci, par-là.

Un genre de puzzle avec des pièces éparpillées, des pièces peu à peu qui se rassemblaient et des pièces manquantes.

Tant que je restais dans le cérébral, dans mon intellect, cela donnait ce genre de puzzle incomplet, pas de quoi être vraiment clown.

Cherchais-je vraiment « mon » clown là il logeait ? Pas vraiment.

Mon clown est dans mon corps, non dans mon intellect, dans ce que je vis, non dans ce que je pense, ou plutôt dans cette relation entre les deux, dans ce que je vis et dans ce que je pense de ce que je vis quand je le donne à voir aux autres qui me regardent et que je suis à l’affût de leurs réactions.

Bref, tout cela a l’air bien compliqué, trop compliqué pour le clown, comme s’il était compliqué de vivre, d’être tout simplement. A cette complexité, le clown répond par le jeu, s’arrête, écoute ce qu’il ressent, interroge le public, reprend son jeu en intégrant ces nouvelles données.

Là encore j’étais loin du clown tant que je n’ouvrais pas ma petite boite et que je ne mettais pas mon nez, ce passage sacré, ce rituel tel que nous l’avait enseigné Jean-Luc.

Me tourner dos au public, me connecter à moi-même, dans une profonde et intime écoute, respirer, faire le vide en moi, me laisser guider par ce nez que je pose sur la partie que je ne vois pas de moi, accueillir cette nouvelle présence, ce nouvel élément, cet autre-moi que je vois, entrer en relation avec cet autre-moi, faire connaissance, nous apprivoiser l’un et l’autre, nous découvrir lentement, me retourner, et découvrir tous deux l’autre, les autres qui nous regardent, l’espace, les objets, les bruits, les odeurs, les sensations, ce lieu où tout devient jeu d’exploration, d’expérimentation, de voyages, d’aventures, approfondir, creuser.

J’en étais là face à la réponse qui m’était posée, face à une certaine urgence, répondre à une commande, monter un spectacle en quelques jours, une animation pour un marché de Noël, animer, faire rire,  apporter un peu de rêve à l’approche d’un Noël terni à par le contexte des attentats, du chômage, de la misère, du réchauffement climatique, des guerres, des exodes forcés…

« Faites-nous rire ! ». Le clown qui fait rire, le clown qui amuse par quelques gags, quelques astuces dont lui seul connaît la recette, le clown qui vient sauver l’humanité d’une situation morose, catastrophique, désespérée, le clown qui apporte un peu d’humanité, de tendresse… Mettre un nez et faire rire, émouvoir, réchauffer les cœurs, ça peut marcher aussi !

J’écrivais une trame, une farce sans parole avec deux personnages, en reprenant le schéma du clown blanc et de l’auguste sur le thème de la restauration de vieux bateaux traversé par cette phrase que j’avais entendue : « Seul, on va plus vite. A deux, on va plus loin », un message, me dis-je, pour Noël comme une bouteille jetée à la mer.

J’étais passé à l’écriture, je m’éloignais sans doute du clown, je contournais l’obstacle des retrouvailles avec mon clown, la peur du vide, la peur de la page blanche.

L’écriture imposait une contrainte de jeu, une partition théâtrale. Comment le clown retrouverait sa place dans cette partition, le clown de Christophe et mon propre clown, là était tout l’enjeu.

Comment le clown s’empare d’une contrainte pour en jouer, pour exister, pour vivre dans l’instant présent de manière authentique, sincère, juste ?

Comment le clown s’amuse à faire le clown ?

Un enjeu, une problématique qui me paraissent intéressants à explorer, se frotter avec cette difficulté d’une partition, creuser plutôt qu’ajouter, l’objectif de travail était défini.

Le temps manquait hélas pour accomplir à bien ce travail.

La première présentation se fit dans l’urgence, une journée de travail à partir de cette trame et de palettes récupérées.

L’urgence peut être un bon déclic pour enclencher un travail.

Ne plus nous poser de questions, plonger, et on verra bien, le réflexe est de nager, de jouer pour nous en sortir.

Le public est là, nous regarde, le temps est pluvieux, maussade, quelques rires, certains visages sans doute surpris, perplexes de voir un tas de palettes, une bâche de chantier, une corde, deux projecteurs au milieu d’un marché de Noël et deux personnages qui se mettent à jouer une sorte de happening.

Après cet happening, vient l’heure du briefing : ce qui a fonctionné ? Ce qui a moins bien fonctionné ? Comment on a vécu cet happening ? Qu’est-ce qu’on fait ? On continue l’aventure ? On s’arrête là ? On fait une pause ? On prend un temps pour réfléchir ?

L’espace de jeu est plus petit que prévu pour jouer cette partition telle qu’elle a été pensée, mise en scène, certains artisans sur les stands nous en font gentiment la remarque.

La dernière proposition est retenue.

Une première étape a été accomplie, posée.

Marché de Noël des Gueux, sur le Parvis de l’Hôtel de Ville des Sables d’Olonne par un jour pluvieux, décembre 2016, quelques palettes récupérées pour réaliser un rêve…

« Seul, on va plus vite. A deux, on va plus loin. »

Nantes, le 11 septembre 2017

 

 

Pêcheurs d’histoires Eté 2016

Le Grain de Sable et la Perle magique, Les Sables d’Olonne, juillet et août 2016

Genèse d’une création, suite.

En mai 2016, je revenais de la région parisienne, après un séjour de quatre mois, pour m’installer à Nantes.

Je rassemblais mes notes prises sur mon carnet bleu pour créer le premier montage de mon nouveau spectacle « Pêcheurs d’histoires » avec cette histoire que j’avais choisie : « Le Grain de sable et la Perle magique ».

En parallèle, je construisais mon théâtre miniature en bois avec l’aide de Mickaël au sein de l’atelier « Plateform C » (Association « Ping »)  sur l’île de Nantes. Julie peignait avec talent les planches des décors, le théâtre et les figurines et m’aidait avec générosité à préparer mon spectacle. Une collaboration fructueuse.

J’avais obtenu des dates pour jouer sur Le Remblai des Sables d’Olonne en juillet et août 2016, au total 25 dates.

Le jour J approchait à grands pas !

Certes, les conditions scéniques n’étaient pas celles que j’avais pu connaître en travaillant durant une quinzaine d’années au sein d’une compagnie professionnelle francilienne. Avec cette troupe, j’avais eu ce bonheur de jouer aux châteaux de Vaux-le-Vicomte, Fontainebleau, Chantilly, du Champ de Bataille, au Festival Off d’Avignon, au Festival « De Capes et d’Epées » de Richelieu, dans le merveilleux théâtre à l’italienne de Fontainebleau, sur de belles scènes comme La Ferme de Corsange à Bailly-Romainvilliers, l’Espace Culturel à Courtry, dans de nombreux établissements scolaires, pour des villages de vacances en Corse, à Courchevel, au Mont Dore, à Soustons, à Ramatuelle, à Chamonix, dans une magnifique villa à Essaouira, et même dans une des maisons de campagne de la famille La Rochefoucault !

Le bonheur de jouer, pourtant, palpitait dans mon cœur. N’avais-je pas un décor extraordinaire ?  Jouer tout au bord de l’océan sous le soleil couchant au milieu d’une ambiance estivale?

Je revenais en quelque sorte à la source, le théâtre dans la rue, en proximité immédiate avec les passants, une rude école et peut-être bien l’une des meilleures écoles pour tester un spectacle et le travailler en conditions extérieures.

Dans la rue, il faut attirer l’attention du passant, qu’il s’arrête, prenne place et qu’il reste jusqu’au bout ! S’il manifeste son contentement par des applaudissements, un petit mot qu’il m’adresse à la fin, une pièce dans mon chapeau, c’est encore mieux ! S’il me demande mes coordonnées, me dit : « je parlerai de vous », ou encore « accepteriez-vous de venir jouer pour… », le challenge est « gagné » !

Jouer dans la rue, c’est faire face aussi aux aléas climatiques, au vent du large qui parfois se lève, à la fraîcheur de certains soirs. Jouer dans la rue, c’est aussi pouvoir me faire entendre entre deux groupes de musique qui poussent souvent leurs décibels un peu trop fort à la terrasse d’un restaurant. Je n’avais pas les moyens financiers pour être sonorisé.

J’entrais dans une zone d’inconfort. Etrangement, je ressentais cette étrange impression d’avoir tout perdu de mon expérience de comédien, d’être comme un débutant.

N’était-ce pas un avantage ? Une renaissance en quelque sorte ? Le privilège de tout recommencer comme au premier jour, lors de mon premier « coup de foudre » pour le théâtre.

L’été commençait timidement, en ce début juillet 2016, fraîchement, avec de la grisaille, quelques gouttes de pluie avant que le flot des vacanciers n’arrive la semaine suivante, accompagné par un soleil généreux qui se maintiendrait, tout l’été, pour notre plus grand bonheur.

Ces premiers temps mirent à l’épreuve ma motivation, mes rêves : peu de spectateurs, peu d’applaudissements, peu de commentaires, des spectateurs qui partaient vite après m’avoir vu jouer, un maigre chapeau…

Dès le lendemain après-midi, je revoyais mon spectacle, changeais certains passages, travaillais la précision de mes gestes, les voix de mes personnages. Et chaque jour ainsi, j’améliorais, je précisais, je consolidais, je m’entraînais avant de partir jouer avec mon chariot de saltimbanque !

Je me souviens d’un évènement particulier en ces premiers jours éprouvants. Il s’était mis à pleuvoir, j’étais l’un des rares artistes qui avait osé venir ce soir-là sur Le Remblai  et y rester. Je cherchais un endroit où m’abriter, je trouvais sur la chaussée une sorte de pergola. Qui viendrait me voir jouer là ? A ma plus grande surprise, quatre adultes quittaient la terrasse du restaurant d’en face et venaient s’asseoir sur le banc de pierre juste en face de moi pour m’écouter et me regarder. C’était mes quatre et uniques spectateurs de la soirée! – Vous nous jouez un spectacle ? me demandaient-ils. Quelque peu embarrassé, je leur expliquais que c’était un spectacle pour les enfants. Ils me répondirent en riant : « Mais nous sommes de grands enfants ! » C’était parti pour une représentation très VIP ! A la fin, ils me remerciaient, me firent des compliments et m’encourageaient à continuer : « C’est une très belle histoire,  et pas que pour les enfants !»

A partir de cet instant, la confiance me gagnait, un pas avait été franchi, une première victoire. Ce fut mon premier rayon de soleil qui resplendissait curieusement un soir de pluie, une lune argentée sur l’océan qui me montrait un chemin d’heureux présages.

Certes, je savais que rien n’était acquis dans le domaine du spectacle vivant, que chaque soir de représentation était un nouveau soir avec des conditions différentes, un public différent qui pouvait par conséquent réagir différemment.

Fort de ce principe, je vivais chaque soir comme un nouveau soir, à chaque fois un nouveau public  à conquérir, à séduire.

Au fond de moi, je me répétais  avant de jouer ce postulat : « Plus je croirai en ce que je fais, plus je serai dans une dimension d’offrir et dans l’exigence du travail bien accompli, tel l’artisan qui porte en lui l’amour de son métier, plus le public, alors, sera réceptif. »

Le plus compliqué était sans doute de capter l’intérêt du premier passant au milieu de  la pléthore de spectacles, d’animations, d’attractions, de divertissements en tout genre qui  lui étaient proposés, entre les groupes de musique, le célèbre clown-magicien Roni, les gonfleurs et sculpteurs de ballon, les acrobates, les jongleurs, les danseurs de hip hop,  les caricaturistes, la statue vivante, les chichi, les glaces, les restaurants, les boutiques de souvenirs, le marché des artisans, le cinéma en plein air et les jeux nocturnes sur la plage…

Mon petit théâtre au milieu de cette abondance de distractions attirait néanmoins plusieurs personnes, adultes et enfants: -« O, regarde, un petit théâtre de marionnettes ! ». Certains s’approchaient pour regarder ce que j’avais fabriqué, avec les yeux émerveillés d’un enfant, et commentaient entre eux : le rideau rouge, la scène, les coulisses, les personnages, le dragon, la sirène, l’huître, les planches illustrées… « On dirait un théâtre de boulevard, comme à Paris ! ».

Mon petit théâtre de marionnettes fascinait aussi bien les enfants que leurs parents comme un monde inattendu, magique, merveilleux. J’avais souhaité proposé ce spectacle intimiste au milieu des animations qui rassemblaient une foule de spectateurs. Je me plaçais à contre-courant en quelque sorte de ce qui se faisait habituellement, contribuant ainsi à la diversité des propositions offertes aux vacanciers.

Mais, ne seraient-ils pas déçus quand je commencerais à jouer ? Songeais-je en moi-même. Je ne suis pas marionnettiste, je ne manipule pas des marionnettes à fils, je ne maîtrise pas cet art qui me fascine. Disons que je suis plutôt un comédien qui raconte des histoires en animant des figurines, ou plutôt, l’enfant que j’étais devenu adulte qui raconte des histoires en animant des figurines, une mise en abîme, une mise en scène de moi-même, le théâtre dans le théâtre, dans ce qu’il peut avoir de plus dépouillé, sincère, en résonnance avec ce que je ressens dans l’instant présent. Cette intention de ma part serait-elle comprise du public ? Était-ce encore du spectacle ? Autant de questions que je me posais à tort ou à raison ? Le doute me traversait. Je comprendrais plus tard que le « mais » est à proscrire !

Mes premières impressions semblaient me donner raison : « Ces spectateurs partent déçus », pensais-je,  « ils se précipitent à appeler leur enfant pour s’en aller voir autre chose sans même glisser une  piécette dans mon chapeau ou applaudir ! ». Bien plus tard, je lirai « Les Accords Toltèques » et j’apprendrai qu’il n’est point bon de formuler des suppositions. La supposition est la porte ouverte à des interprétations erronées, sans aucune preuve fondée, engendrant par là de fausses croyances qui nous font plus de mal que de bien, et sont de ce fait inutiles.

Je luttais en moi-même pour m’efforcer à voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide, à me raccrocher à tout ce qu’il y avait de positif, à ce positif qui me permettait de continuer le lendemain. Et je réalisais qu’il y avait beaucoup de « positif » !

Je jouais en moyenne trois séances par soir, quatre, les soirs de grande foule.

Mes amis de la région commençaient, les uns après les autres, à venir me voir jouer, à me photographier, pour la plupart des amis artistes, comédiens, metteur en scène, conteuse, chanteur. Je remercie Michal, Francis, Emmanuel, Elise, Nadette grâce à qui j’ai pu publier mes premières images de représentations sur Facebook et les partager à mes amis éloignés qui me suivaient à distance, m’écrivaient de gentils mots si doux et encourageants.

Certains amis animés d’une bonne intention à mon égard me disaient « C’est bien ce que tu fais, mais ce n’est pas en jouant ici que tu vas gagner ta vie. »

Sans doute ils disaient vrai. Mes chapeaux se situaient entre 2  et 43 euros les plus beaux soirs, pas de quoi déclarer un cachet ! Cela me permettait néanmoins de rembourser mes frais engagés pour la création de mon spectacle.

J’ai toujours porté beaucoup de respect pour chaque pièce donnée, aussi petite soit-elle. Chaque personne donne en fonction de ce qu’elle peut ou a envie de donner. Ce respect et cette gratitude sont pour moi  importants lorsque nous faisons le choix de jouer dans la rue au « chapeau ». Je choisissais de compter l’argent de mon chapeau le lendemain matin pour deux raisons : D’abord, pour savourer en m’endormant mon premier plaisir, celui d’avoir procurer du plaisir à des petits et grands spectateurs, puis, pour débuter la journée à mon réveil avec une autre belle surprise, le gain monétaire de mon travail accompli la veille !

Ce que je gagnais valait en fait bien plus que sa valeur monétaire. En plus d’avoir le plaisir d’offrir du plaisir, j’avais la possibilité de travailler dans la rue mon spectacle en prise directe avec un public éclectique. Cela représentait à mes yeux une véritable richesse. Une résidence de création de 25 soirées m’était offerte par la Ville des Sables d’Olonne, sous un ciel étoilé au bord de l’océan, avec les retours immédiats des spectateurs! Une expérience peu rémunératrice et pourtant si enrichissante ! Je me voyais comme cette petite carpe persévérante qui remontait le courant pour réussir. Cette détermination me tenait debout, je puisais en elle à chaque séance ma force.  Et puis, je n’étais pas seul ! Mes figurines comptaient sur moi et je comptais sur elles ! Une connivence, une confiance, une fidélité, un secret entre nous nous reliaient intimement, chaque soir de représentation.

Quand, au milieu de cette ambiance estivale, un 14 juillet, a surgi l’innommable, l’horrible attentat sur la Croisette de Nice.

Comment ne pas faire le lien ? Le Remblai avait évidemment des airs de Croisette par son ambiance festive, la densité de vacanciers qui s’y promenaient, les nombreuses terrasses de restaurants bondées à cette saison, cette large et jolie allée bordée d’arbres et de candélabres face à l’océan.

Que découvrirais-je le lendemain ? Les spectacles y seraient-ils annulés pour éviter les attroupements et les risques liés à de nouvelles menaces terroristes.

Non, la vie semblait continuer, plus forte encore, juste des forces de sécurité renforcées, des militaires armés qui passaient à travers la fête.

« Show must go on ! »

Il nous fallait ça, continuer malgré tout  à vivre, à rire, à aimer, à nous émouvoir, à nous promener, à jouer librement au cœur de l’espace public, à découvrir et apprécier mille spectacles. Les enfants n’avaient-ils pas le droit à ce bonheur, à leurs vacances, à cet imaginaire que certains êtres insensés voulaient leur ôter.

Parmi tous les artistes présents, j’apportais mon humble part en jouant « Le Grain de sable et la Perle magique ».

L’art vivant répondait sa véritable raison d’exister, son sens, son but essentiel : ouvrir des fenêtres de liberté, de fraternité.

Ensemble, spectateurs et artistes, nous redessinions les sillons du possible, ce chemin argenté que nous offrait la Lune sur les vagues de l’océan, malgré la douleur qui demeurait au fond de nos cœurs.

De mes 63 représentations sur Le Remblai des Sables d’Olonne en cet été 2016, il me reste aujourd’hui le souvenir de ces rencontres, de ces images, de ces paroles inoubliables.

Dès lors qu’un enfant venait s’assoir sur le tapis gentiment offert par Julie et disposé devant mon théâtre,  je pouvais commencer à jouer ! Même pour un enfant ! Ce n’est la quantité des spectateurs qui compte, à mon sens. Ce qui me parait être le plus important, c’est cette qualité d’écoute qui peut s’installer entre le spectateur et moi, ou, plutôt, entre le spectateur, les figurines et moi.

Très vite, dès que je commençais à jouer, un autre enfant le rejoignait, prenait place, puis un autre… Leurs parents et leurs grands-parents respectifs choisissaient la place debout derrière (faute de gradins et de sièges !), formant ainsi un cercle, nous protégeant du vent et des décibels des sonos voisines.

Certains soirs, le public pouvait être très nombreux, au point de m’encercler. Je me retrouvais tel un artiste de cirque au milieu de sa piste ! Les spectateurs qui se trouvaient dans mon dos pouvaient apprécier le spectacle côté « coulisses » ! Une belle occasion pour revenir et le découvrir de face !

Chaque fois, j’étais ému lorsqu’un enfant venait me voir timidement à la fin d’une séance pour me dire : « Elle est jolie votre histoire, monsieur ». Des maman, papa, grands-parents me félicitaient aussi.

D’heureuses autres surprises s’offraient à moi comme ces nuages noirs en début de soirée balayés par le vent du large pour laisser place à une belle et douce soirée sous les étoiles.

Je rencontrais par hasard le directeur d’un collège de la région parisienne  qui me fit l’honneur de venir me voir jouer.  J’avais interprété dans son établissement les rôles d’Harpagon et du Malade imaginaire. « Le monde est petit ! » me dis-je.

Une professeure de français, un soir, venait jusqu’à moi: « Pourriez-vous me donner vos coordonnées ? Je souhaiterais vous faire venir dans ma classe pour faire découvrir à mes élèves qui sont en 5ème le conte, car j’ai bien apprécié votre manière de conter. J’enseigne à Paris».

Ceux et celles qui me connaissaient me faisaient souvent ce retour : « cela te va bien !»

Une simplicité,  le fait de créer un univers avec pas grand-chose, d’être sincère, de vivre l’instant présent.

L’histoire en elle-même touchait également les cœurs et présentait des aspects pédagogiques en lien avec le patrimoine local tout en s’enrichissant d’une autre culture.

Je me souviens encore de cette maman qui arrivait essoufflée avec son enfant et me demanda: « C’est ici le théâtre de marionnettes ? ». Sans doute en avait-elle entendu parler, sans doute avait-elle organisé la sortie avec son enfant, se dépêchant pour ne pas rater l’heure de la séance ! Ses mots m’avaient beaucoup touché, sans qu’elle le su. Je me suis senti soudain identifié, reconnu comme « le petit théâtre de marionnettes du Remblai » ! Le bouche à oreille commençait à tracer son chemin à travers la foule des passants.

D’autres souvenirs aussi touchants les uns que les autres rejaillissent du fond de ma mémoire…

Une maman montrait à son enfant ce que je préparais en coulisses en commentant chacun de mes gestes.

Je m’apprêtais à démonter mon théâtre, il se faisait déjà tard et bon nombre d’artistes avait remballé, quand, des parents avec leurs enfants vinrent me voir : « Vous jouez encore ? », « Bien sûr, asseyez-vous ! ». Je remontais vite fait ce que j’avais commencé à démonter et je jouais pour mon plus grand plaisir et le leur !

Une autre fois, à 23 heures,  un garçon venant de la terrasse du restaurant d’en face  me demanda : -Vous pouvez jouer pour ma petite sœur ? Elle aimerait vous voir. Elle a fini de manger mais mes parents mangent encore. -Avec joie ! » lui répondais-je. Le garçon tout content repartait annoncer la bonne nouvelle à sa maman et à sa petite sœur. La maman accompagna sa petite fille et me tendait un billet de 5 euros. Je dis à la petite fille : « Tu me le donneras à la fin si tu as aimé ». La maman choisissait finalement de s’asseoir auprès de sa fille pour regarder. Ainsi, je jouais pour cette petite fille et sa maman pendant que leur famille en face terminait leur repas tout en regardant depuis leur table mon spectacle ! Ce fut l’un de mes plus gros billets reçus avec le joli sourire de cette petite spectatrice et de sa maman!

Je recevais aussi d’heureux cadeaux quelques jours après une représentation. Cette maman que je rencontrais : « Mes filles ont beaucoup aimé votre spectacle, elles m’en parlent tous les jours. »… Cet ami, professeur de lettres retraité, grand-père jeune de cœur, d’esprit et de corps et voyageur érudit: « Ton spectacle est tendre et poétique, il reflète le monde de l’enfance». Cette autre maman sur Le Remblai, originaire du Nord de la France, revenue me voir pour me dire : « J’ai vu votre histoire, continuez ce que vous faites, vous nous transportez dans le monde de l’enfance, vous avez du courage… ».

 

Le dernier soir approchait, les dernières représentations. Bon nombre de vacanciers et d’artistes étaient déjà rentrés. Combien de fois jouerais-je pour la « dernière » ? Une fois, deux fois, trois fois ? Quels seraient les derniers retours, les derniers mots du public ? Le Remblai retrouvait peu à peu une certaine sérénité comme un rideau qui se referme lentement sur l’océan. Je me sentais fier d’être allé jusqu’au bout, d’être l’un des derniers artistes à jouer et à « remballer ».

Finalement, je jouerai trois fois. Je n’ai pas eu le privilège d’une ovation d’une foule de spectateurs comme je la voyais dans mes rêves à l’instar de certains de mes collègues artistes du Remblai.

Les « adieux » furent plutôt discrets, un peu sans doute, à l’image de mon spectacle.

Alors que le public s’était dispersé, un enfant s’est approché de moi et est venu me poser toutes sortes de questions sur mon théâtre. Il semblait fort intéressé pour savoir comment je faisais vivre toutes mes figurines et pour découvrir l’envers caché de mon spectacle. Sa maman le rejoignait et me demanda  si j’accepterais de venir jouer pour l’anniversaire de son fils en décembre à Paris (décidément, Paris est un grand village !) : « Chaque année, j’invite les camarades de mon fils pour fêter avec lui son anniversaire. L’année dernière, c’était le poney, et cette année, je réfléchis à autre chose… ». Réaliser le rêve d’un enfant, quoi de plus beau ?

C’est sur cette dernière rencontre et cette pensée que se terminait mon aventure, ou, plutôt, l’aventure des « Pêcheurs d’histoires » et de mes héros, Pierrot et Amélie, sur Le Remblai des Sables d’Olonne.

Le Remblai s’était presque vidé de tous ses vacanciers et artistes.

Un peintre, sur un banc, après avoir fermé sa valise, fumait, l’air pensif, sur un banc.

Le dernier groupe de musique avait fini de jouer.

Quelques passants sortaient d’un pub qui s’apprêtait à fermer.

Un couple enlacé rejoignait son tendre nid d’amour.

Au loin, sur la plage, quelques jeunes célébraient leur amitié, chantant et buvant.

Je me retournais une dernière fois vers l’océan : la Lune et son chemin argenté sur les vagues me souriaient, une larme de joie étincelante coulait sur ma joue sous la chaude lumière bleuâtre d’un réverbère.

Le personnel épuisé d’un restaurant, après avoir rangé tables et chaises et passé la serpillière, fêtait la fin de l’été avec leur chef autour d’un bon verre de vin.

L’air est encore doux en cette fin de saison estivale.

Je saluais l’océan et sa Lune, les remerciant de tout ce qu’ils m’avaient offert.

Puis, je reprenais mon chemin, tirant mon chariot de saltimbanque. Je repassais une dernière fois devant l’hôtel des voyageurs. Une bonne heure de marche m’attendait sous un merveilleux ciel étoilé avant de rejoindre à Olonne-Sur-Mer la maison de mes amis, Pascal et Danielle, qui m’avaient accueilli si gentiment tout l’été. Sans eux, mon rêve n’aurait jamais pu se réaliser.

Le long de ma route, je repensais à mes vacances au bord de la mer avec mes parents et mon frère lorsque j’étais un enfant.

 

On emporte avec soi tant de beaux souvenirs de ses vacances…

 

De quoi l’avenir serait fait ? Les invitations à jouer sur Paris se concrétiseraient-elles ? Obtiendrais-je de nouvelles dates ? Des contrats rémunérés ? L’aventure continuerait-elle ? Je l’ignorais encore à cette heure…

 

L’incertitude du lendemain, chez nous autres artistes, est notre quotidien, ce qui fait la précarité et aussi le charme de notre existence, nous autres saltimbanques de passage sur la Terre, habitants éphémères, où l’instant d’un rêve partagé, ensemble, nous refaisons le monde.

 

Quelque part, ces pensées me rassuraient, je m’y raccrochais comme on se raccroche à la Lune, aux Etoiles, au Soleil !

Antoine de Saint-Exupéry me murmurait à l’oreille ces derniers mots sous l’océan infini du ciel :

« Fais de ta vie un rêve,

Et de tes rêves, la réalité ».

 Nantes, le 26 mars 2017.

(Photographies de Michal Brooky et Francis Lempérière)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le chien, le chat et la perle magique

Le Grain de Sable et la Perle magique

Genèse d’une création – 2ème épisode-

J’avais la forme de « Pêcheurs d’histoires », il me restait à trouver le contenu…

Quelles histoires raconter, quelles histoires mettre en scène ?

Je séjournais en ce début d’année 2016 sur Paris et l’océan déjà me manquait.

Je me promenais dans les bibliothèques, les librairies, et je choisissais, porté par le « hasard », des recueils de contes en lien avec l’océan, la rivière.

Je me nourrissais en quelque sorte  de ces histoires. Un mot pouvait me toucher dans une histoire, ou un début d’histoire.

Ce fut le cas pour : « Le chien, le chat et la perle magique ».

Les tout premiers mots parlaient à mon cœur, résonnaient au fond de moi, je n’avais pas à réfléchir, je me laissais emporter par le courant de ces mots jusqu’au moment où ces mots cessaient de me parler, de résonner en moi, où je les quittais avec respect, gratitude.

Cette histoire coréenne rapportée par Kim Seon-hui, Kim Ji-won, Lee Seul et traduite par Rodolphe Meidinger commençait ainsi :

« Il était une fois un vieux couple qui vivait dans un village. (…). Comme le vieil homme était pêcheur, il sortait tous les jours sa barque en Mer jaune pour ramener du poisson. Le couple n’était pas bien riche, et le vieil homme ne ramenait pas toujours suffisamment de poissons.

Un matin, comme d’habitude, il jeta son filet dans les eaux calmes de la Mer jaune. Et, ce matin-là, il ramena dans son filet un très gros poisson. Il le sortit de l’eau, tout joyeux de sa bonne prise, et au moment où il allait le jeter au fond de la barque, il vit que le poisson pleurait. Il le regarda d’un air incrédule, mais celui-là versait véritablement de grosses larmes.

-Que ce poisson doit être triste ! se dit le vieil homme. Il a vraiment l’air malheureux. Va ! Retourne chez toi ! lança-t-il en relâchant le poisson dans les eaux de la Mer jaune.

Ce jour-là, il ne ramassa plus rien d’autre dans ses filets. Il n’y aurait qu’un peu de riz à manger, mais ce n’était pas grave parce qu’il avait le sentiment d’avoir fait quelque chose de bien. »

Je m’arrêtais  sur ces mots, je les goûtais maintes fois comme une saveur agréable, inépuisable, sans cesse renouvelée. Quelque chose d’essentiel que ces mots voulaient bien me glisser à l’instant présent dans le creux de mon coeur: « Il n’y aurait qu’un peu de riz à manger, mais ce n’était pas grave parce qu’il avait le sentiment d’avoir fait quelque chose de bien. »

Et si dans ces mots pouvait être contenu l’essentiel d’une vie : avoir le sentiment d’avoir fait quelque chose de bien ?

Alors, le reste, le matériel semblait devenir secondaire.

L’essentiel n’était-il pas là dans le but de ma vie : faire quelque chose de bien ?

Me détacher du matériel, de l’ « avoir » pour me concentrer sur le sens de ma vie, de ce pourquoi je suis au monde, sur ma relation aux autres êtres vivants ?

Ce genre de vérités qu’on apprenait peut-être en vieillissant, la sagesse que nous offraient les années qui s’écoulent ? Quand s’effacent les choses, que restent-ils ? Un sentiment ?

Cette sagesse supposait un sens averti de l’observation. Qui peut voir un poisson pleurer à part celui qui prend le temps d’observer la nature dans son langage le plus subtil?

L’histoire aurait pu s’arrêter ici, le vieil homme avait déjà sa récompense, il avait gagné sa journée : ce sentiment d’avoir fait quelque chose de bien dans sa vie.

Par curiosité, je continuais néanmoins ma lecture :

« Le même soir, un jeune homme inconnu (…) vint frapper à leur porte.

(…) – Pourquoi venez-vous nous rendre visite ? S’inquiéta le vieil homme.

-Je venais juste vous rendre grâce, et vous inviter à dîner, répondit le beau jeune homme.

-Me rendre grâce ? Mais je n’ai jamais rien fait pour vous, répondit le pêcheur.

-Aujourd’hui, vous avez relâché un poisson… C’était moi !

(…) Le jeune homme emmena le pêcheur au « palais de Yong Wang le roi Dragon puisque le roi du royaume des abysses était le père du jeune homme. Ils y mangèrent un repas somptueux. A chaque plat, le vieil homme se confondait en excuses, arguant que c’était trop pour lui. A la fin du dîner, le jeune prince sortit de la manche de son hanbok une grosse perle de nacre.

-Regardez cette perle, dit le prince, c’est une perle particulière. Elle porte chance. Tenez, prenez-la, elle vous apportera fortune. »

Voici que faisaient leur apparition : le jeune homme fils d’un dragon, le roi Dragon, une perle.

Cette idée de « faire quelque chose de bien » continuait d’animer les motivations du vieil homme et cela le rendait si attachant à mes yeux : « Sur le chemin du retour, il était tout guilleret à l’idée de voir la tête de sa femme, elle allait être bien surprise en voyant cette magnifique perle qu’il lui ramenait. »

Sur ces mots, je suspendais ma lecture de l’histoire afin d’en écrire au gré de mon imagination la suite.

Que pouvait-il bien se produire après ?

Que représentaient le dragon et la perle dans la culture coréenne ?

Une recherche sur internet m’apportait vite des réponses, je m’empressais de les recopier et de me nourrir de ce que j’apprenais:

« Le dragon oriental est l’un des deux grands types de dragons et s’oppose au dragon européen dans le sens qu’il n’est pas automatiquement mauvais. »

Un gentil dragon, dans une période de violence, de menaces terroristes, de peurs en tout genre, cela me plaisait bien, une espérance, un sursaut d’espoir, de vie auquel me raccrocher, et de plus, qui venait d’une autre culture, d’un autre océan, de l’Orient.

Mes notes griffonnées par-ci par -là sur mon petit carnet bleu ouvraient les bribes de mon imaginaire.

Je vous les livre à l’état brut :

Le ventre du dragon oriental est « celui d’un mollusque et le reste de son corps est couvert de 117 écailles de carpe ».

« Le dragon chinois n’a ordinairement pas d’ailes, ce qui ne l’empêche pas de voler, grâce à la crête surplombant son crâne. »

« Sa principale source de pouvoir réside dans une grosse perle qu’il cache sous les replis de son menton ou dans sa gorge. »

« Cette perle est souvent synonyme de bonheur, d’abondance, de sagesse ou de connaissance pour celui qui la possède. »

« Contrairement à son cousin occidental, le dragon chinois ne ressemble pas à un dragon dès sa naissance. Il passera par divers stades de métamorphose qui s’étendent sur 3 000 ans. »

« L’œuf de dragon n’éclot qu’après 1 000 ans, donnant naissance à un serpent aquatique. Il acquiert, après 500 ans, une tête de carpe. (…) Il atteint finalement l’âge adulte après un autre millénaire, obtenant de facto une paire d’ailes ramifiées. »

Je me souvenais alors de cette légende chinoise que m’avait rapportée un homme retraité, passionné pour la culture asiatique, que j’avais rencontré dans le jardin oriental qu’il avait fait jaillir au cœur du bocage vendéen. (Les jardins du Loriot près de La Roche-Sur-Yon).

La carpe qui parvenait à remonter le courant se transformait en dragon.

Elle représentait pour la jeunesse chinoise la persévérance, la réussite.

Chemin de vie, transformations progressives, remonter le courant, être persévérant, réussir sa vie… Et si vieillir était se diriger vers la source, l’accès à une nouvelle vie, à une transformation intérieure, la véritable réussite de sa vie ?

Ces perspectives attisaient mon envie de créer, de raconter, de jouer.

Mais, ce n’était pas tout, j’apprenais que les dragons orientaux pouvaient « être messagers des dieux, guides des humains, gardiens des richesses de la terre, ou maitres des éléments. »

Ecologie, éducation, épanouissement personnel, quête du bonheur… tous ces thèmes résonnaient en mon cœur comme une aspiration à vivre, à écrire, à transmettre. En plein milieu de l’état d’urgence, un nouvel état d’urgence naissait au fond de moi : « avoir le sentiment d’avoir fait quelque chose de bien dans ma vie ».

Le grand large m’appelait et je découvrais à ma plus grande joie ceci :

Le « dragon terrestre » est « le maitre des sources et des cours d’eau qu’il dirige à son gré. Il séjourne durant l’été dans le ciel et passe l’automne dans la mer. Il est intimement lié au climat et à l’eau. Il a d’ailleurs tendance à vivre dans ou à proximité de grandes étendues d’eau : fleuves tumultueux, au fond des océans, ou au cœur des gros nuages. »

Le « dragon coréen est associé à l’eau et à l’agriculture, amenant les nuages et la pluie. » Il « habite généralement les fleuves, les lacs, les océans. »

Passionnant, initiatique et écolo, n’est-ce pas ce dragon ?

Et, pour couronner le tout, il  symbolise l’ « immortalité, de par sa longévité exceptionnelle ».

Riche de ces connaissances, avec une ébauche d’histoire sur les pages de mon petit carnet bleu, je quittais Paris en avril 2016 pour rejoindre mes amis demeurant à Olonne-Sur-Mer.

Ma seconde exploration commençait, celle liée au patrimoine naturel du littoral atlantique breton vendéen.

Je retrouvais l’océan et la chaleur familiale, paisible d’une maison.

Un soir de veillée, Danielle, Présidente de notre Compagnie L’Arbre à Palabres, professeur retraitée de biologie, m’expliquait à travers de jolis petits dessins le voyage des bébés anguilles de la Mer des Sargasses jusqu’aux rivières des marais, remontant le courant pour grandir. Quand les anguilles atteignent l’âge adulte, elles retournent dans l’océan pour donner vie  de nouveaux bébés anguilles, et c’est reparti ! L’anguille est un grand migrateur, capable au cours de sa vie de passer par « des milieux présentant différents taux de salinité, de la mer vers l’eau douce puis à nouveau vers la mer » et de s’orienter.

Merveille de la nature qui me rappelait étrangement la légende chinoise de la carpe qui remontait le courant de la rivière.

J’appris que l’anguille était une espèce menacée ou en risque d’extinction en Europe[].

Un jour, je fis un détour par le Musée du Coquillage des Sables d’Olonne. Sa responsable était heureuse et fière de me montrer les perles dans les huîtres exposées dans les vitrines, une « spécialité de notre musée » me disait-elle. C’était en effet magnifique, et ce fut encore plus magnifique quand j’ai appris l’origine des perles. La connaissez-vous ?

« Une perle est une concrétion calcaire, généralement de couleur blanche, fabriquée par certains mollusques bivalves (principalement les huîtres perlières). Quand un objet irritant passe à l’intérieur de la coquille, comme un grain de sable, l’animal réagit en entourant l’objet d’une couche de carbonate de calcium CaCO3 sous la forme d’aragonite ou de calcite. Ce mélange est appelé nacre. »

Etonnant, n’est-ce pas, ce pouvoir de la nature de transformer ce qui l’incommode en œuvre d’art sublime et lisse ?

Prendre le temps d’observer, d’écouter ce que nous enseigne le monde animal, la nature. Là encore je retrouvais un chemin de sagesse.

Ce que j’apprenais de part et d’autre se rejoignaient à la rencontre de l’eau salée et de l’eau douce, légendes asiatiques avec ses dragon, ses perles et patrimoine breton vendéen avec ses huîtres, leurs perles, ses marais, ses rivières, ses anguilles, ses pêcheurs…

Un clin d’œil à Clémenceau qui rapportait la culture orientale en sa terre natale de Vendée, face à l’océan, dans une modeste maison qu’il louait, à Saint-Vincent-Sur-Jard.

C’était bien là ce qui me séduisait : la rencontre des cultures, l’ouverture à l’autre, l’enrichissement mutuel, le respect de l’environnement, et ces questions essentielles : qu’est-ce que réussir sa vie ? Qu’est-ce qu’être heureux ?

Il me restait à assembler toutes les pièces éparses de mon puzzle, agencer mes bribes de notes sur mon petit carnet bleu pour en composer une belle histoire à l’écoute de  la douce musique de l’océan ! Cette histoire s’appellerait : « Le Grain de sable et la Perle magique ».

La suite? Au prochain épisode, mes Amis « followers » !

 

 

 

2- « Les Cris » de Christina Mirjol

Je dois une grande partie de ma formation théâtrale à Christina Mirjol, qui, à l’issue de ses cours d’art dramatique que je suivais, m’a proposé, en 2000-2001, d’intégrer sa compagnie théâtrale « Presqu’Il » pour jouer dans sa  nouvelle création “Les Cris”.

Jouer dans une pièce mise en scène par son auteur avec des comédiens professionnels expérimentés est sans doute, à mon sens, l’une des meilleures écoles.

Ce fut pour moi l’une de mes plus belles expériences.

Comme mes partenaires, Raymond Dehéras, Anne Fourniret-Longhini, Jean-Pierre Garnier, Boris Gillot, Joëlle Mezza , Maïté Bareyt, Catherine Baumier, Michèle Thuilliez, j’avais plusieurs “cris” à jouer dans une configuration scénique bien définie :

« On rentre, on s’assoit sur des chaises, quelqu’un crie, un autre se lève, traverse, est rejoint au milieu, disparaît. Un autre crie assis. Celui-là crie longtemps. Cet autre -là se tait. Les chaises sont chiffrées, disposée,  il faut dire dans une drôle de suite. Incompréhensible. Avec des gens assis. Nous. Le public. Une étrange d’assemblée. Des numéros en vrac. Quelqu’un sourit, et là, quelqu’un crie de nouveau, puis un énergumène qui depuis le début brandit nerveusement un livre à tout propos, jette au milieu des numéros. Derrière les portes, beaucoup de cris sont audibles, affirme-t-il, tout à coup alors qu’on est assis sur les chaises, tranquilles ; dans la rue, dans les gares, et au bout de notre interminable couloir. Quand on ferme la porte, poursuit-il, le paillasson est dérangé. Sur ce, une multitude de cris s’amoncellent pêle-mêle  pendant qu’un chien  furieux, on ne sait pourquoi, au pied de sa chaise, aboie. Quelques 70 cris. Enfin, ça s’arrête là. Sans raison. Mais bon. C’est pas trop tôt ! »
(Extrait du dossier de presse)

Je me souviens de ces personnages étonnants comme Gérard ou le condamné que je vous invite à rencontrer avec d’autres en lisant « Les Cris » de Christina Mirjol ( édition du Laquet).

Les chaises disposées formaient un rectangle. Les spectateurs venaient s’asseoir entre nous. Nous nous levions tour à tour pour jouer seul, à deux, ou tous ensemble au-milieu du rectangle ou en dehors. L’écrivain appelait nos cris dans un ordre différent à chaque représentation.

Les répétitions se déroulaient à Paris dans le 19ème arrondissement. Nous étions dans une démarche de recherche, un laboratoire de création guidé par Christina Mirjol, auteur et metteur en scène, en lien avec Edmont Saffar, scénographe.

Christina me demanda si je pouvais jouer avec mon chien. Surpris et heureux, je dis aussitôt « oui ». Mon chien, fidèle compagnon qui me suivait partout, fut ravi, prenant plaisir à venir jouer parmi nous !

Je jouais avec mon chien dans le spectacle « Les cris » de Christina Mirjol.

« Les Cris » ont pu être joués en différents lieux :

La Comedia, Paris, 14-15-16 décembre 2001
Les Dix jours du théâtre, Dammarie-lès-Lys, 20 mai 2001
Festival de Nangis, du 9 au 13 mai 2001
Les Rencontres de Villenauxe-la-Petite (Patrimoine et Culture en Bassée),Everly, 24 mars 2001
Expression libre, Villiers-sous-Grez, 3 février 2001
Lire en Fête,  Association Internationale Culture Sans Frontières, 14 octobre 2000
Les Rencontres théâtrales de Marne-la-Vallée, Ferme du Buisson, 9 mai 2000
Librairie Equipages, 12 mai 2000

De beaux souvenirs de théâtre !

Le texte a été monté depuis par de nombreuses compagnies.

Je vous invite à découvrir « Les Cris » et Christina MIrjol en allant visiter son site.

http://www.christinamirjol.com

A bientôt mes Amis lecteurs pour un nouvel article!

 

1- Naissance des Pêcheurs d’histoires

 

Spectacle Jeune Public

Naissance des « Pêcheurs d’histoires »

Le Grain de sable et la Perle magique

Thierry Rousse conte des histoires au bord de la mer avec des figurines et des planches illustrées. Pêcheurs d'histoires, conte et théâtre d'objets "Le Grain de sable et la Perle magique"
Pêcheurs d’histoires

Une aventure qui a débuté en mai 2016 d’une envie, l’envie de jouer au bord de l’océan et de parler de ce qui me relie à la mer. La première image qui me vient de la mer est des souvenirs de vacances en famille à Collioure, au Pouliguen et à Pornic. Enfant, j’aimais jouer sur la plage au bord de la mer, me raconter des histoires avec des figurines. En créant à l’âge de 49 ans le concept des « Pêcheurs d’histoires », j’ai souhaité retrouver cette part d’enfance en moi, ce plaisir de jouer, rêver, raconter une histoire, d’abord pour moi-même, puis pour les autres, mes proches et les camarades rencontrés. Vivre un instant de joie, d’évasion, de voyage. Raconter une histoire en m’amusant avec des figurines et des planches illustrées en guise de décors dans un théâtre miniature en bois. Installer un rapport de proximité avec mon public. J’avais le concept, il me restait à trouver une histoire..