Y’a ceux qui parlent et qui font

Y’a ceux qui parlent

Y’a ceux qui font

Y’a ceux qui parlent et qui font

A vingt ans

T’avais posé ton stylo d’la poésie

Tu t’étais dit

J’écrirai d’la poésie quand j’aurai vécu

Alors t’as vécu

T’es venu en aide aux gens de l’rue

A un tas d’gens souvent qu’on regarde

Avec des a priori

Les migrants

Les sortants d’prison

Les malades mentaux

Toi

Tu les as regardés avec ton cœur

Tu les as longuement écoutés

T’as recueilli leurs récits

T’as même créé un journal L’inconnu

Pour les publier

T’as même créé Le petit théâtre de la vie

Où ils ont pu rejouer leur vie

T’as rien lâché

T’as appris au bout de dix ans

A entrer dans le monde des autistes

Puis des enfants, des adolescents

Qu’on dit déficients

T’as même créé avec ta collègue éducatrice

L’Appart’ager

Eux les rejetés de partout

Ont trouvé ici leur place

Se sont sentis exister

Reconnus

T’as jamais rien lâché

Tu t’es battu pour leur dignité

Puis il y a eu ton père

Juste à la retraite

Qui a fait un AVC

Handicapé à vie

T’as vécu alors avec lui

T’as fait tout c’qu’t’as pu

Pour qu’il soit heureux

T’as jamais rien lâché

T’as connu les déceptions du coeur

Les brutales séparations

T’as tout quitté

T’as dégringolé

Et t’y as cru

Qu’un jour on pouvait se relever

Et t’y as cru

Qu’un jour on pouvait se relever

Face à la mer

Même invisible

Même ignoré

T’as fait ta place

Là où on voulait pas te donner une place

Là où on voulait pas vraiment voir

Ce dont t’étais capable

T’as connu c’qu’était être étranger

Dans une autre contrée

Oui

D’la société

Aujourd’hui

T’attends plus grand chose

T’as tout compris

Presque tout de la vie

Être ou pas dans ses p’tits papiers

On t’a fait l’coup du confinement

T’interdire de marcher au bord d’une rivière

Alors

Alors

Dis-moi si j’mens

A cinquante trois ans

T’as pris l’air

Tu t’étais dit

Cette fois-ci

J’ai vécu

Tant de joies tant de galères

J’peux bien écrire d’la poésie

Oh rien d’extraordinaire

Juste

Une vie parmi des milliards

Juste

Une vie parmi des milliards

Est né Marcel

Solitaire

Sur un trottoir

Y’a ceux qui parlent

Y’a ceux qui font

Y’a ceux qui parlent et qui font l’espoir

T’attends rien de l’édition

T’attends plus rien du monde

Rien non plus d’ces institutions

Qui tournent en rond

Dans leurs p’tits cercles

Renfermées

Souvent trop élitistes

Tu sais bien

Qu’t’es pas né du bon côté d’Paris

Et t’en es fier

Ta vie est comme un élastique

Un coeur lancé vers les étoiles

Tu vises tout l’univers

Ces p’tits mots

Qu’tu laisseras derrière toi

“On n’est pas sérieux quand on a vingt ans”

Rimbaud t’a ouvert l’chemin

Des p’tits cailloux qu’on sème

Et avec lui un tas d’bohèmes

Le grand Jacques

Jacquot

Brassens

Moustaki

Ferré

Ferrat

Dylan

Renaud

Bernard

Jean-Louis

Thiéfaine

Cabrel

La liste est longue dans le ciel

Avant qu’un Grand Corps Malade

Ne fut ton nouveau départ

Y’a ceux qui parlent

Y’a ceux qui font

Y’a ceux qui parlent et qui font ensemble

L’impossible

Devient

Possible

Les ailes

Tournoient

Dans un éclair

T’allumes ta lumière

Y’a ceux qui parlent

Y’a ceux qui font

Y’a ceux qui parlent et qui font

Le nouveau monde

Thierry Rousse
Nantes, lundi 10 février 2025
"Une vie parmi des milliards"

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